1/3 : 1963, une boîte à outils plutôt qu’un modèle

D’emblée, Corine Defrance tenait à rappeler qu’on avait certes beaucoup célébré le 60ème anniversaire du Traité de l’Elysée, et à juste titre, mais qu’il ne fallait pas oublier que ce 22 janvier, on avait aussi fêté les 4 ans du Traité d’Aix-la-Chapelle, cet « Elysée 2.0 » voulu par Emmanuel Macron et Angela Merkel.

 

A Aix, en 2019, il ne s’agissait pas de remplacer le Traité de l’Elysée – de toute façon, on ne touche pas à un lieu de mémoire aussi positif et aussi symbolique – mais de le mettre à jour, de l’adapter au XXIème siècle. Ceci dit, si le Traité d’Aix englobe bien des enjeux contemporains comme le numérique et la lutte contre le réchauffement climatique, il se voit, seulement quatre ans plus tard, déjà dépassé par le nouveau défi de l’agression russe en Ukraine qui a mis la question de la paix à nouveau au premier plan.

 

Peut-on tirer des leçons de 1963 pour un continent à nouveau en guerre en 2023 ?

 

Selon Corine Defrance, il est toujours utile de réfléchir à ce qui a marché dans le passé et ce qui a échoué. Ce qu’il faut éviter en revanche, c’est ériger l’expérience réussie franco-allemande en modèle pour d’autres. Les dernières décennies ont montré qu’appliquer des recettes franco-allemandes dans le monde n’est sans doute pas la voie à suivre. A titre d’exemple, la déclaration, lors d’un sommet Chirac-Schröder à Mayence en 2000, comme quoi « la réconciliation franco-allemande comme modèle pour le rapprochement dans les Balkans » a fait scandale. Il est vrai que la situation n’est jamais la même entre anciens belligérants, le contexte est particulier, et le type de guerre conditionne les sorties de guerre, de rapprochement et de réconciliation.

 

Ceci dit, des pays tiers s’inspirent parfois de la « boîte à outils franco-allemande » pour l’adapter à leur contexte. On a ainsi vu émerger des initiatives comme la création d’un office de jeunesse dans les Balkans occidentaux, sur l’exemple de l’OFAJ, l’une des réalisations les plus emblématiques du Traité de l’Elysée, ou encore la révision commune de manuels scolaires. C’est dans des outils de l’éducation à la paix que réside sans doute l’héritage le plus concret de 1963.

 

Pour conclure, Corine Defrance est revenue sur le Traité d’Aix-la-Chapelle, en soulignant que l’un des plus grands mérites était l’engagement ferme de placer la coopération et l’amitié franco-allemande dans une perspective européenne, de faire en sorte que l’expérience accumulée soit au service de l’intégration européenne – une ouverture qui était aux antipodes de la philosophie de 1963.

 

Retrouvez l’intervention filmée ci-dessous :