L’entretien de Marina Valensise avec Jean-Marc Ferry vient de paraître dans la revue italienne Aspenia (revue n°78, 2017, Aspen Institute, pp244-258) en version italienne.
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Extrait (question 7) :
Au-delà de l’économie et du politique, il y l’histoire. Croyez-vous dans la réserve de l’imaginaire ? Existe-t-il la possibilité de ressourcer le désir de l’Europe par l’appel à une civilisation commune, unique et extraordinaire, malgré le déclin de celle-ci et la crise démographique qui condamne la population de l’Europe à la disparition ?
« C’est la question que viennent à se poser les personnes inquiètes d’un possible échec de l’Union.
Un problème tient à ce que les appels à réactiver le « désir d’Europe » sont rémanents dans les innombrables colloques sur « l’avenir de l’Europe ». En s’en tenant à évoquer la « richesse unique » du « patrimoine européen », les intervenants ne sont guère entendus que par une vieille garde. Les étudiants sont, quant à eux, portés à ne voir dans de tels discours qu’une berceuse mystificatrice, une façon de masquer les questions âpres auxquelles ils se voient confrontés, lorsqu’ils sont sans aide pour s’alimenter, se vêtir, se loger et réussir leurs études. Oui, l’invocation de notre héritage civilisationnel a perdu sa force de motivation. Pourtant, « l’Europe » n’est pas seulement un projet politique. Elle est aussi un projet civilisationnel, et encore, un projet philosophique, à en croire le grand Husserl. Rappeler ces projets à la jeunesse étudiante n’est jamais vain, à condition de savoir relier un tel discours sur l’héritage aux enjeux « froids » d’aujourd’hui, mais en gardant le lien avec la perspective humaniste. »