« Europe, crise et critique » en collaboration avec Marie Auffray-Seguette et Arnauld Leclerc, Paris, Presses Universitaires de Paris-Sorbonne, coll. « Philosophie appliquée », 2015
« L’Europe était dans l’œil du cyclone, et les économistes faisaient à la fois l’objet de toutes les suspicions et de toutes les espérances. Mais pour autant qu’elle empruntât des formes économiques et financières et connût de lourdes retombées sociales, il était devenu évident que cette crise était aussi une crise politique, une crise institutionnelle, une crise de sens et de légitimité. Le projet européen semblait privé de te/os. La solidarité manquait à l’appel. L’identité commune ne parvenait pas à se construire. La citoyenneté se nichait dans les interstices de l’administration locale. La démocratie était exsangue. Les technocrates prenaient — seuls — les paris les plus périlleux. C’est une chaire de philosophie, une chaire unique en Europe : La chaire de Philosophie de l’Europe de l’université de Nantes, qui a réuni en deux temps, sur trois journées, des économistes, des politistes, des juristes, des philosophes et des parlementaires afin de réfléchir conjointement à la plurivocité de la crise européenne et tâcher de bâtir ensemble des propositions de sortie de crise lesquelles, en aucun cas, ne prétendent se tenir au bout du chemin ni délivrer assez de vérité pour clore le débat sur les causes ou sur les devenirs possibles. Car au contraire, outre la vertu du croisement des modes de lecture, outre l’affirmation de connexions et de distinctions auxquelles on était peu accoutumé (entre citoyenneté et nationalité, entre peuple et nation, entre souveraineté et autorité…), ce que ces échanges ont donné à entendre, c’est la fécondité de la crise du point de vue de la pensée critique, c’est l’étroite relation qui noue, en son principe, la crise à la critique. Voici qui nous interdit de concevoir l’issue autrement que comme un «acheminement contingent vers l’idéal», quand bien même il pourrait au fond surtout s’agir de renouer avec les fondements de l’humanisme européen exprimés en un désir de monde (cosmos) et d’égalité (polis). »